RFI – Le goût du monde du 19 mai 2017, « Cuisine populaire, Chez Chartier »
YANN HULIN (directeur) : Au tout départ, c’est une cantine d’ouvriers ; des ouvriers qui ont construit le métro, la Tour Eiffel, l’exposition universelle de 1900. On voulait un endroit populaire, accessible à tout le monde, que les gens viennent manger comme chez eux, comme à la cantine, et ce qui fait que les gens venaient tous les jours. Ils avaient leurs places attribuées, leurs serviettes qu’ils laissaient dans les petits casiers qu’on trouvait un petit peu partout. Ils prenaient leurs repas, ils payaient, ils repartaient aussitôt et ils revenaient le lendemain.
CLIENT 1 : Nous, on est sur Rouen. Là on est en chantier à Paris. Quand on est tombés sur cette brasserie où on est servis à la bonne franquette, où les choses sont simples… Après, en termes de prix, c’est vachement accessible aussi. On est tombés amoureux de cet endroit. Quand on est venus à Paris, j’ai dit à Guillaume : « On ira chez Chartier » et depuis qu’on est venus, il y vient tout le temps.
YANN HULIN : Ensuite, nous avons deux messieurs qui viennent tous les midis. C’est tous les jours, toute l’année, tout le temps la même table. Ils arrivent à l’ouverture à 11h30. Ensuite, nous avons quelques habitués qui viennent une fois par semaine.
CLIENTE 2 : C’est notre table des habituées du mercredi.
CLIENT 3 : Je fais ma cinquante et unième rentrée des classes.
YANN HULIN: Ah, c’est aujourd’hui ?
CLIENT 5 : Le premier déjeuner, nous étions deux. Chemise blanche et moi. Monsieur est architecte, j’avais un chantier dans le coin.
CLIENT 6 : Voilà, premier rendez-vous de chantier ici. Et après, boule de neige !
CLIENT 7 : On appelle cette table « la table des antiquaires » et nous n’avons pas un seul antiquaire parmi nous.
YANN HULIN : L’esprit cantine aussi, c’est que tout le monde mangeait avec tout le monde. Une table de quatre, c’est quatre personnes qui ne se connaissent pas forcément.
CLIENTE 8 : Une andouillette grillée, s’il vous plait.
SERVEUR : Après, pas de vin, Mesdames ?
CLIENTE 8 : Non, un petit kir, ça va.
CLEMENCE DENAVIT (journaliste) : Je me suis pas présentée, je pensais que vous étiez ensemble en fait.
CLIENTE 8 : Non pas du tout.
YANN HULIN : C’est pas grave.
YANN HULIN : Vous avez pas une table chez Chartier, vous avez une place.
SERVEUR : En suggestion pour les desserts, on vous propose le baba au rhum et le chou glace vanille sauce chocolat.
YANN HULIN : Ils ont une gestuelle pour poser les plats, pour porter les plats sur leur bras. Et les dix-neuf garçons sont là pour servir tout le monde. Il y a trois cent trente places, donc ça rentre constamment, ça sort constamment. Les maîtres d’hôtels qui essaient de se frayer un chemin pour installer les gens rapidement. Faut débarrasser, faut redresser et c’est un véritable ballet et chacun a sa place. Ils ont leur périmètre d’action, pour servir les clients et ça se passe très bien.
SERVEUR 1 : Deux avocats, deux œufs, un céleri.
SERVEUR 2 : Un café, un 25 de rouge.
SERVEUR 1 : Une compote de pomme, un pruneau, un café.
YANN HULIN : C’est pratiquement « un client, un escargot ». L’escargot, le foie gras…
SERVEUR 2 : Votre foie gras.
CLIENTE 9 : Merci !
YANN HULIN : Et tout ce qui est classique, en fait. Parce qu’à la maison, vous ne faites plus un pot-au-feu, vous ne faites plus une tête de veau. Donc il faut venir chez Chartier.